Les anniversaires sont loin d’être gais chez le canadien Soso, à en juger par les chansons particulièrement déprimées “entonnées” sur son dernier EP, Birthday Songs. Ce constat n’étonnera en rien ceux qui ont eu l’occasion d’écouter Sour Suite, un premier essai que le rappeur, DJ et producteur du Saskatchewan avait sorti en 2000. Les quelques plages de ce nouveau disque y répandent en effet les mêmes sons squelettiques et dépouillés, la même ambiance sobre et dépressive.
Le temps s’est écoulé pourtant depuis l’inégal Sour Suite. Non pas que Soso, son comparse Epic et leur label Clothes Horse aient cessé d’être obscurs et de n’intéresser que deux ou trois webzines fureteurs. Mais le temps a laissé au canadien l’occasion de se glisser sur quelques compilations (Fishin’ in Troubled Waters avec un titre déjà connu ou récemment le Time Invested de Factor) et plus encore d’éprouver et de confirmer ses talents de producteurs sur le 8:30 in Newfoundland d’Epic et sur une partie du Friends 4ever de Pip Skid. C’est donc sans surprise que Soso livre cette fois-ci un EP plus constant et plus abouti que son prédécesseur.
Démonstration dès les premières notes de Birthday Songs : après ‘Waiting for the Harmonica to Drop’, une première plage instrumentale à la guitare acoustique (l’harmonica ne surviendra que bien plus tard sur le disque), le rappeur entre dans le vif du sujet sur un ‘It Goes’ où il évoque les malentendus qui ont conduit à une rupture durable avec sa girlfriend, accompagné par un piano et relayé par un étrange et amer refrain.
Une guitare, un piano, quelques cordes en filigrane : “jamais plus d’un ou deux instruments à la fois” semble être le mot d’ordre du canadien. Et comme cela ne suffit pas, il en rajoute dans l’austérité avec la note quasi unique qui domine ‘For Ruby’, et la question qui y est martelée : “what do they call it passing away ?”. Rien d’étonnant ceci dit dans ce dépouillement extrême pour un morceau intégralement centré sur le thème de la mort.
Sans atteindre ces sommets de minimalisme et de thématique morbide, le EP se poursuit sur un ton approchant. Sur ‘Pretty Mound of Dirt’, et avec un beat aussi rachitique que le précédent, tout juste habillé à mi-course par un piano élégant, Soso hésite à regarder son passé en face. Sur ‘Dyke Look’, le plus électronique et “expérimental” des titres, le plus singulier musicalement et thématiquement, il affirme avoir l’aspect d’une lesbienne. Et sur ‘Birthday Song’, sur un beat moins étouffant que les précédents, le rappeur nous apprend enfin quel anniversaire il célèbre, évoquant la grossesse non désirée de son amie.
Six titres seulement se sont à peine écoulés que ‘Hand to the Plow’, un instrumental réussi et évidemment lent, nous annonce que Birthday Songs touche déjà à son terme. Soso achève son disque aussitôt après par ‘We always Thought she’d be the First to Go’, un final en guitare (toujours), violoncelle et harmonica qui n’est pas sans évoquer un Mazzy Star rap. Et c’est un compliment. Comme en mérite d’ailleurs l’ensemble du EP. Il y a deux ans, notre chronique de Sour Suite terminait par une note positive, en insistant sur les bons augures qui laissaient entrevoir le meilleur quant à l’avenir de Soso. Ce meilleur, Birthday Songs n’en est franchement plus très loin.
Sylvain, novembre 2002
A noter : l’ironique gâteau d’anniversaire qu’arbore le CD cache, outre ces 8 titres, d’intéressantes plages multimedia.